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Les mystères de Riverside Gardens

Chapitre 3 : Les funérailles

Aujourd’hui, les funérailles d’Andrews sont dans toutes les têtes. Mais le doute s’installe sur Riverside Gardens, Andrews a été assassiné.

Quelques jours après la découverte macabre…

Sue

Sue contempla une dernière fois le rapport de police. « Mort par crise cardiaque. ». Aucune suspicion de meurtre, aucune enquête de prévue. Rien, nada. Andrews était mort, il était vieux, et un vieux qui meurt, la police s’en contrefiche. Pourquoi enquêter ? De toute façon le pauvre vieux allait de toute façon passer l’arme à gauche sous peu ?

Aucune investigation, aucun interrogatoire, Riverside Gardens ne serait pas le théâtre d’une série policière. Sue pouvait souffler, aucun cadavre ne serait déterré par de jeunes policiers fouineurs. Mort naturelle, voilà le verdict.

Avaient-ils au moins vérifié si Andrews avait un passif cardiaque ? S’il était susceptible de faire un infarctus ? Non. Ils ignoraient complètement qu’Andrews était dans une forme olympique. Ils n’avaient aucune idée qu’il avait le coeur d’un jeune homme de 40 ans. Oui, ils ignoraient qu’il était impossible qu’Andrews ait pu faire une crise cardiaque. Impossible.

Son coeur luttait entre le soulagement et l’angoisse. Et si les policiers changeaient d’avis. Si Martha insistait pour qu’il y ait une enquête.

Ah, et puis cette histoire de piscine la contrariait. La piscine aurait dû être fermée. Franck assurait qu’il l’avait fermé. Bon, avec lui, on n’était jamais sûr.

Mais si Franck avait bien fermé la porte, ça voulait dire que quelqu’un d’autre l’avait ouverte. Mais qui ?

Il n’aurait pas dû mourir dans la piscine. Pas dans la piscine. Les assurances allaient leur tomber dessus. Pire Martha pourrait les poursuivre. Si Riverside Gardens était poursuivi en justice, elle perdrait son poste, c’était certain. Et il n’en faudrait pas plus pour que tout soit découvert.

Elle avait tout fait pour protéger son secret. Elle ne pouvait pas tout risquer pour une erreur de porte de piscine. Martha ! Oui, Martha était encore une fois la clef de ses problèmes. La manipuler avait toujours été un jeu d’enfant.

Bruce

Bruce vérifia qu’il était seul dans l’atelier. Il ferma la porte à clef. Fébrile, il s’agenouilla sous l’établi et ouvrit la trappe. Il poussa les bidons d’huile et se faufila.

Une écharde de bois s’enfonça dans son flanc. Il émit un grognement de douleur. Ce n’était plus de son âge de prendre de tels risques. Si l’un des trois jardiniers rentrait, comment justifierait-il sa présence ? Et si on découvrait la trappe ? Mais il n’avait pas le choix, il le fallait.

Sa lourde carcasse passait à peine à travers l’interstice. Le plus dur était de s’extirper de la trappe pour atteindre le workshop. Sa tête cogna lourdement l’établi de Franck. Plusieurs outils s’écrasèrent sur le sol, en un bruit sourd. Son souffle se coupa, ses oreilles se mirent à l’affût du moindre bruit. Pourvu que personne n’ait entendu. Après s’être péniblement relevé, il tenta de remettre les outils à leurs places.

Son regard parcourut la pièce. Les vêtements de Franck étaient posés nonchalamment sur une chaise. La bouteille de la nouvelle petite jardinière avait été oubliée sur la table. Aucune trace cependant de son acolyte expert du râteau. Personne, l’atelier des jardiniers était désert.

Pas le temps de tergiverser. Première étape, il fallait qu’il récupère le sachet pour enfin s’en débarrasser. Il se dirigea vers sa cachette, il grimpa sur une des tondeuses. Son regard glissa sur le sol poussiéreux de la mezzanine, il poussa le panneau « A VENDRE ». Ses yeux balayèrent les moutons de poussières. Aucune trace du sachet. Disparu.

Seule une trace plus claire au sol confirmait à Bruce : il n’avait pas rêvé, le sachet avait bien été là. Mais il avait disparu. Bruce secoua la tête paniqué.

Ses bras affolés poussèrent tous les panneaux, il ne pouvait pas y croire. Si quelqu’un avait trouvé le sachet, il risquait… Non, il ne pouvait pas y songer. Pourvu que la personne qui ait le sachet ne décide pas de goûter à son contenu. Elle risquait de finir comme Andrews.

L’esprit de Bruce se figura la petite jardinière, allongée inconsciente sur le sol. Il fallait absolument qu’il retrouve le sachet avant qu’un nouveau drame ne frappe Riverside Gardens.

Presque midi, il fallait qu’il fasse vite. Il avait encore une dernière chose à faire.

Il se dirigea vers l’évier. Sur le mur, toutes les clés étaient là, chaque crochet supportait plusieurs trousseaux. Il fouilla dans sa poche, et en sortit la paire de clefs. Il l’accrocha délicatement au crochet du milieu. « Piscine » pouvait-on lire sur l’étiquette du porte clefs.

Rita

Mais bon sang, où était Bruce ? Il avait filé comme un voleur ce matin. Elle l’appela sur son téléphone plusieurs fois, pas de réponse. Çà la faisait enrager.

Un doute s’insinua dans son esprit, et si il avait rechuté ? Si son Bruce était encore aller voir ailleurs. Il lui avait promis, il avait fait amende honorable. Mais Bruce était un homme comme les autres. Faible.

La jalousie s’insinua dans ses veines. Tel un poison, elle commençait à sentir l’amertume la consumer. Il fallait qu’elle en ait le coeur net. La nuit du drame, déjà Bruce n’était pas au lit. Il avait prétendu s’être endormi dans le van. Mais était-il seul dans le van ?

C’était son Bruce et il le resterait. Si elle avait pu lui pardonner une fois, elle pouvait lui pardonner une deuxième fois. Et puis, aucune concurrente ne pourrait être pire que Paula. Oh, mais attends, et si Paula n’avait pas tenu sa promesse ? Oserait-elle s’attaquer de nouveau à Bruce en dépit de leur amitié ?

Rita chassa d’un revers de la main cette option. Paula avait été claire, et elle s’intéressait beaucoup plus au nouveau du 87 pour s’attaquer à Bruce. Elle devenait folle, Bruce était sûrement juste en train de bricoler.

Enfin, elle reçut un SMS de Bruce, il avait à faire dans son van ce matin. Il arrivait dans quelques minutes pour joindre les funérailles. Elle soupira soulagée. Oui, enfin dans le doute, une petite enquête ne ferait pas de mal.

En l’attendant, elle se plaça devant son miroir pour finaliser son maquillage. Son reflet lui renvoya l’image d’une grosse vieille dame souriante. Sa gaine peinait à cacher ses bourrelets. Au moins, le noir affinait légèrement sa silhouette. Enfin, pouvait-on parler d’affiner à son stade de surpoids ?

Elle attrapa son ventre et le secoua. Elle avait perdu deux kilos cette semaine, deux malheureux kilos alors qu’elle s’était affamée depuis sept jours. Sept jours qu’elle rêvait du buffet des funérailles, sept jours qu’elle s’imaginait croquer dans les douceurs que Martha préparerait.

Il était trop tard de toute façon, les kilos étaient installés. Elle n’avait plus l’âge de courir après une taille de guêpe. Et puis, Bruce l’aimait ainsi… Non ?

Susan

C’était le quatrième enterrement auquel elle allait cette année. Et encore, elle avait raté celui de Berth le mois dernier. Enfin raté, elle n’avait pas été conviée ! Elle haussa les épaules en se remémorant cet affront. De toute façon, c’était une piètre cérémonie, et le buffet était affreux, lui avait-on rapporté. Bref elle n’avait rien raté.

Aujourd’hui, en revanche, elle se devait d’être là. Ils marchaient en silence derrière le cercueil. Le cortège était lent. Tous les résidents avaient été invités. La marche funèbre était jolie à voir. Les visages graves se suivaient. On pouvait lire dans les regards la peur d’être le prochain. D’ailleurs, Susan se demanda qui serait la prochaine victime de la Mort. Çà n’avait plus d’importance, de toute façon. Depuis la mort de Rick, pouvait mourir qui veut.

Susan songea qu’ils ressemblaient sûrement à une file indienne de fourmis. Sauf que les fourmis étaient sûrement moins hypocrites. Un cortège de non dits, voilà ce qu’ils étaient. La moitié d’entre eux n’étaient là que pour profiter du buffet ensuite. L’autre moitié cachait sûrement un cadavre dans le placard, et paniquait à l’idée qu’Andrews ait pu laissé une trace de leur vilain secret.

Ah Andrews, il avait été son ami et son confident aussi. Il allait lui manquer. Un peu. Mais le manque peut-il se partager ? Rick lui manquait tellement, qu’elle n’était pas sûre d’avoir assez de place pour qu’Andrews lui manque aussi.

D’ailleurs, avait-elle été spéciale dans la vie d’Andrews ? Après tout, Andrews était le confident de tout le monde. Quand un secret douteux, une affaire délicate perturbait la vie paisible des résidents de Riverside Gardens, c’était Andrews qu’ils allaient voir.

Parfois, ils oubliaient qu’Andrews en faisait un véritable business. Il facturait ses services, et plutôt cher en plus. Mais sa discrétion et son efficacité faisaient oublier la facture salée. Andrews réglait tous vos problèmes, ou presque.

Mais peut être qu’Andrews était allé trop loin ? Qu’un des secrets avait été trop lourd ? Il y avait un meurtrier parmi la foule, et Susan le découvrirait. Elle avait toujours rêvé d’être enquêtrice, elle allait découvrir qui avait tué Andrews et pourquoi.

Susan était allé un peu plus tôt trouver Martha pour la réconforter. Celle-ci lui avait appris, « Crise Cardiaque ». Andrews était mort naturellement d’une crise cardiaque, comme tant d’autres de sa génération. Rien d’alarmant pour la police, piscine ou sol du salon, ça n’avait pas d’importance.

Mais Susan savait, et elle n’était pas la seule, qu’Andrews était en très bonne forme. Si crise cardiaque, il y avait eu, elle avait été provoqué par quelque chose, et Susan allait le découvrir.

Elle scruta le visage couvert de larmes de Martha. La femme d’Andrews cacherait-elle le visage d’une meurtrière sous le masque de la veuve éplorée ? Ou serait-ce ce nouveau voisin du 87, au regard sombre ? Ou Bruce, qui n’avait même pas pris la peine d’enfiler une chemise et cachait péniblement son polo jaune des Wallabies sous un gilet noir trop petit pour lui ? Oui Bruce, qu’elle avait vu entrer en dernier dans la piscine avec Andrews…

Ou peut être serait-ce John, l’homme au chapeau. Il lui avait toujours semblé si mystérieux.

Alors qu’elle le dévisageait, il intercepta son regard. La lueur d’intensité dans ses yeux la troublèrent. Elle ressentit une vague de frissons qu’elle n’avait pas ressenti depuis plus de cinquante ans, le jour où elle avait rencontré Rick.

Paula

Paula attrapa du bout des doigts un toast au saumon. La crème à l’aneth déborda sur son majeur. Elle dégusta le petit four, puis lécha ostensiblement son doigt en plongeant son regard dans les yeux du voisin ténébreux.

Elle avait pu enfin pu l’approcher. Il faut dire qu’elle y avait mis les moyens. Cette robe en satin mettait ses formes parfaitement en valeur. Sa taille de guêpe était marquée, le décolleté laissait apparaître ses seins dodus et le satin se posait sur son fessier comme une caresse. C’était si proche du corps, qu’elle n’avait pas pu mettre de dessous. Et ce n’était pas pour lui déplaire…

Ça faisait des semaines qu’elle tentait d’attirer son attention. Il avait emménagé, il y a deux mois déjà. Elle avait tout de suite remarqué ses épaules larges, ses mains puissantes, son regard de braise quand il était venu un matin à la piscine. Il avait à peine 60 ans, un beau jeune homme. Depuis que ses pupilles s’étaient posées sur son corps solide, son corps de trappeur, elle rêvait de le croquer.

Malheureusement, le ténébreux était fuyant. On l’apercevait à peine dans la résidence. Elle avait dû soudoyé Alison, la réceptionniste, pour avoir son nom. James Court. Hum ça ressemblait à un nom d’espion. Peut être l’était-il ?

Elle l’avait pisté. Il partait aux aurores dans sa voiture noire et ne rentrait qu’après le coucher du soleil. Elle avait mené son enquête, personne ne le connaissait. Il était aussi mystérieux qu’il en avait l’air.

Alors aujourd’hui, quand elle l’avait aperçu dans le cortège, elle avait été plus que surprise.Paula n’avait pas connaissance que James soit proche d’Andrews. Personne ne les avait jamais vu ensembles. L’esprit déviant de Paula se figura les deux beaux mâles dans son lit, elle eut un frisson de plaisir.

C’est vrai qu’Andrews connaissait du monde, avec ses petites combines. Ça le rendait encore plus sexy d’ailleurs… Il avait été un amant de choix. Il était endurant pour son âge, et il avait su la faire grimper aux rideaux. Et ses doigts, oh oui, ses doigts robustes savaient y faire avec Paula.

Non, mais attendez, maintenant qu’elle y pensait… Andrews, une crise cardiaque ? Impossible, c’était le plus sportif de tous ses amants. Oui, même l’un des papys les plus en forme ici. Il n’avait pas pu mourir d’un infarctus, absolument impossible. Andrews avait été assassiné, elle en avait maintenant la certitude. Et en souvenir des merveilleuses nuits passées, elle allait tenter de le découvrir.

Hum, peut être que son petit agent secret pourrait l’aider ? Il la contemplait, l’air interdit, lécher les dernières gouttes de crème sur ses phalanges. Le regard de Paula ne laissait aucun doute sur ses intentions. En revanche, les iris noires de James restaient insondables.

Cette nouvelle proie n’allait pas être facile. Et c’est bien ça qui le rendait encore plus désirable. Elle jeta ses longs cheveux en arrière et commença à minauder, à le questionner naïvement. Dés les premières questions, il renvoya la balle et l’interrogea. Paula adorait parler, elle se fit une joie de raconter sa vie d’antan. Jamais, non pas une seconde, ses yeux ne le lâchait. Il restèrent un instant à discuter. Le téléphone de James vibra dans sa poche, il y jeta un coup d’oeil, s’excusa et partit précipitamment.

Paula secoua la tête. Cette sauterie n’avait désormais plus d’intérêt. Son instinct lui disait que la mort d’Andrews n’était sans doute pas sans rapport avec le coté mystérieux du jeune du 87. Il fallait qu’elle trouve Rita, c’était de loin la meilleure partenaire pour résoudre ce crime.

Franck

Franck souleva péniblement la porte du workshop pour qu’elle s’enroule. Il n’avait pas beaucoup de temps avant que les deux apprentis jardiniers n’arrivent. Vite, il fouilla dans son casier. Ah, le sachet était là. Ces pilules étaient magiques. Il en avait pris deux ce matin et l’énergie ne l’avait pas quitté. Pourtant, là la fatigue venait de lui tomber dessus.

Il contempla le sac transparent et la vingtaine de pilules roses. Comme un cadeau du ciel, il les avait trouvé sur la mezzanine. Là, comme des bonbons, pour lui. Peut être qu’elles avaient toujours étaient là ? C’était peut être à Bill ? Ou alors, non, peut être le chat sauvage ? Il divaguait, non les chats ne faisaient pas de drogues. Son esprit imagina un chat et ses petites pattes fabriquer des centaines de pilules roses. Il se mit à rire. Son fou rire ne s’arrêtait plus.

Le bruit du Ute derrière lui le sortit de son euphorie. Il attrapa trois des pilules et les engloutit avec sa boisson énergisante. Il claqua la porte de son casier. L’énergie semblait déjà l’envahir de nouveau. Il sortit de l’atelier et apostropha Bruce qui passait devant. Bruce lui fit un signe de tête et s’empressa de rejoindre son van sur le terrain vague. Hum bizarre, d’habitude, Bruce aimait bien discuter avec Franck.

Chaud, il avait chaud d’un coup. Il fallait qu’il s’asperge le visage. Il prit le tuyau d’arrosage et s’aspergea d’un grand jet d’eau. Il était trempé. Son fou rire reprit de plus belle.

Quand il se retourna, Benjamin et Mélanie, les deux jardiniers le dévisageaient l’air perplexe. Mais son fou rire ne voulait pas s’arrêter. Ils haussèrent les épaules, et se dirigèrent vers l’intérieur de l’atelier. Ça faisait quelques temps que les bizarreries de Franck ne les surprenaient plus.

Il attrapa le tuyau d’air comprimé, l’air soulevait ses cheveux mouillés et gras. Ah, à chaque fois, c’était comme rafraîchir son cerveau. Il adorait ce petit vent frais. Pshit Pshit Pshit, et son esprit se faisait plus clair.

Sa bonne humeur s’envola quand il se rappela qu’aujourd’hui c’était les funérailles d’Andrews. Andrews, c’était son ami. Il l’avait toujours couvert. Evidement, lui aussi, il rendait des services à Andrews. Mais Andrews savait le remercier comme il fallait. Qui allait lui fournir ses petits remontants, quand le sachet serait terminé ?

Ah, et cette histoire de piscine le perturbait. Il avait fermé la porte. Oui, oui, il en était sûr. Il avait verrouillé la porte. Elle était verrouillée. Il avait poussé le bouton. Il n’oubliait jamais. Et puis, il y avait la clef, la clef avait disparu. Quand Sue lui avait passé un savon pour la porte de la piscine, il était allé vérifier. La deuxième clef de la piscine avait disparu. Ni Mélanie, ni Benjamin ne l’avaient vue. Disparue. Il ne l’avait pas dit à Sue. Il fallait qu’il retrouve cette clef.

Il se dirigea vers l’évier et contempla le regard vide les clefs qui s’alignaient. Quand enfin son regard se posa sur la paire de clefs, « Piscine ». Mais ? Mais, comment était-ce possible ? Ils avaient regardé, ils avaient cherché partout. Elles étaient là, elles le narguaient.

Franck fut secoué d’une vague de tics, il plissa les yeux. C’était un coup du chat sauvage, il en était sûr.Ce maudit chat sauvage lui faisait une mauvaise blague. Il allait encore le faire tourner en bourrique.

Suite la semaine prochaine…

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