Catégories
Les mystères de Riverside Gardens

Chapitre 6 : Un vol de plus

Riverside Gardens doit faire face à un nouveau crime, le vol de figurines de jardin. Qui donc a osé s’emparer des trésors des résidents ?

2 ans et demi plus tôt

Sue

Sue secoua la tête en regardant Andrews. Il la regarda d’un air hagard, il faisait de son mieux pour trouver son maître chanteur, il lui assura retourner ciel et terre pour trouver le coupable.

Elle pointa un doigt menaçant vers lui, s’il ne se dépêchait pas de retrouver celui ou celle qui la menait en bateau depuis six longs mois, elle se ferait un plaisir de le dénoncer auprès de Martha. Elle ajouta avec un sourire narquois qu’elle espérait que c’était bien la première et la dernière fois qu’il avait fauté auprès de Paula.

Il opina et reprit, il aurait besoin d’un peu de matériel pour mener son enquête, une paire de jumelle, peut être une paire de clés ou deux pour pouvoir entrer dans les maisons des suspects. Les yeux de Sue s’arrondir, et puis quoi encore, il voulait aussi qu’elle lui donne les clefs de la caisse et le code du coffre ? Avait-il au moins des suspects en tête ?

Mitchell et Georgia semblaient, à son sens, pas très clairs, ils rodaient souvent autour du hall le vendredi. Et s’arrangeaient toujours pour le faire quand le hall était plein. Oui, Andrews pensait que le couple légendaire de Riverside Gardens cachait quelque chose. Mais sans le trousseau, évidemment, ça allait être plus dur d’en être sûr. Il plongea ses yeux dans ceux de Sue, et ajouta qu’il comprenait qu’elle ne lui fasse pas confiance. Il soupira, dommage, ils étaient à si peu de résoudre le mystère.

Sue grommela qu’elle allait voir ce qu’elle pouvait faire. Elle devait impérativement mettre la main sur le bougre qui la faisait chanter, elle était déjà à plus de six mille dollars de rançon et elle n’en voyait pas le bout. Et puis, elle ne savait plus quoi inventer dans les comptes pour faire passer les dépenses de 500 dollars chaque semaine.

D’abord, elle avait réduit le salaire du pauvre Franck, en ajoutant une ligne de taxe supplémentaire, elle récupérait 200 dollars chaque semaine. Il n’y avait vu que du feu. Elle ne pouvait décemment pas faire ça avec Bill ou Allison. Pour les 300 dollars de plus, elle faisait notes de frais sur notes de frais.

Malheureusement, le nouveau propriétaire avait commencé à questionner les dépenses chez Bunnings et l’incroyable consommation d’essence des deux utilitaires. Les jardiniers avaient-ils besoin d’autant de gants ? De lunettes de soleil ? Peut être devraient-ils arrêter de procurer au personnel lait, café et thé, ou leur en limiter la consommation ? Plus de cinquante dollars en café soluble et sachets de thé par semaine, oui, tout ça lui paraissait aberrant. Il allait creuser, elle le sentait, et pour la première fois cette semaine, elle avait du mettre de sa propre poche sous le conduit d’aération pour éloigner les soupçons.

Andrews l’observa une dernière fois du coin de l’oeil. À contre coeur, elle déclara qu’elle lui fournirait ce dont il avait besoin. Mais attention, il avait deux semaines pour mener sa mission à bien.

Il quitta la pièce un sourire étrange sur le visage. Sue retourna à son ordinateur et chercha la paire de jumelles.

Alors qu’elle faisait défiler les articles sur son écran, le talkie walkie se mit à l’appeler « Copy Sue ». Elle répondit agacée. Qu’est-ce que les jardiniers avaient encore ? On ne pouvait pas être tranquille dix minutes ici ?

Un nouveau nain de jardin venait de disparaître, c’était le quatrième ce mois-ci. Sue vociféra, le chat sauvage et le maître chanteur ne suffisaient plus, il y a avait maintenant un voleur de figurines de jardin qui rodait.

Franck

Franck coupa la communication avec Sue. Elle avait l’air encore plus courroucée qu’à son habitude. Il frissonna, sa chef le rendait très nerveux. Elle provoquait chez lui une peur bleue. À chaque fois qu’il devait l’appeler sur le talkie walkie, à chaque fois qu’il passait devant son bureau, il sentait que le courage le quittait. Oui tous ses muscles étaient tendus, il était secoué de tics, et commençait à bafouiller. Et plus il était nerveux, plus elle perdait patience.

Il bredouilla, un dernier mot dans le talkie walkie, et se tourna vers Bill. « Elle n’est pas contente, elle veut que nous trouvions le coupable. ». Bill rit, elle pouvait toujours courir. Il trouvait cette histoire de vol de nains de jardin hilarante. Un peu d’animation à Riverside Gardens ne faisait pas de mal, après tout. Et puis, il était jardinier, pas policier, si elle voulait vraiment résoudre l’affaire, elle n’avait qu’à appeler la police, la vraie.

Franck roulait des yeux dans tous les sens. Il ne savait pas quoi faire, écouter Bill ou obéir à Sue. Il fut secoué de tics, ses yeux clignaient frénétiquement et il secouait la tête nerveusement. Pour se rassurer, il chercha sa casquette sur son crâne, mais rien pas de trace de son couvre chef. Ses deux mains lissèrent ses cheveux gras, il était embêté, ou était sa casquette ?

Oh mais peut être que celui qui avait volé le koala en céramique avait aussi volé sa casquette ? Et s’il rodait autour d’eux en ce moment ? Franck jeta un coup d’oeil furtif par dessus son épaule, personne… Une branche bougea au dessus de sa tête, il sursauta. Il ne pouvait plus contrôler le battement de ses cils, il fut parcourut de frissons. Le chat sauvage, tout ça c’était le chat sauvage, il le savait.

Il parla à haute voix sans s’en rendre compte. Bill le contemplait avec cette lueur d’amusement et d’agacement qui lui était propre. Ça suffit Franck avec ce chat sauvage, il fallait qu’il laisse la bête tranquille. Il voyait bien que les dix pièges ne fonctionnaient pas. Vaincu, il fallait s’avouer vaincu, c’est tout. Il n’y avait pas mort d’homme !

Les paroles de Bill s’envolèrent, comme les pétales d’un pissenlit, elles furent emportées par le vent, avant d’atteindre le cerveau embrouillé de Franck.

Celui-ci se rappelait sa petite victoire, il y a six mois. Le piège avait du sang, il avait presque réussi à attraper le chat sauvage. Quand il avait compris que le sang venait de l’animal, il avait cherché les traces de sang, il en avait suivi la piste. Il avait parcouru presque deux rues, en suivant les petites gouttes d’hémoglobine. Pourtant, elles s’étaient arrêtées comme ça au milieu d’un des jardins. Il n’avait pas osé questionné les résidents.

Il se rappelait s’être faufilé sous le sous basement de leur maison, mais aucune trace, ni de sang, ni de chat sauvage… Le maudit félin l’avait encore échappé. Depuis six mois, il le traquait sans relâche, mais plus aucun résultat, les pièges restaient désespérément vides, et immaculés, plus aucune tâche de sang.

Non, et puis voilà que le chat sauvage se mettait à voler des koalas et des suricates en pierre ? Qu’est-ce qui lui prenait ? Il devait être très agile pour pouvoir les porter avec ses petites pattes. Franck imagina l’animal agile porter sur son dos les lourdes statuettes. Peut être se trompait-il ? Peut être que le chat sauvage n’avait rien à voir avec le vol ?

Il fut tiré de ses pensées par Bill qui lui remettait sa casquette sur le crâne. Un mystère de moins à résoudre.

Rita

Rita finissait de siroter son thé en regardant ses cartes. Elle pouvait gagner maintenant, mais son devoir politique lui dictait de laisser ses compagnes mener le jeu. Pour compenser la déception de devoir faire semblant, elle reprit un biscuit. C’était le onzième qu’elle dégustait. Onze biscuits fourrés au chocolat, dix de trop, dix de plus que les quatre femmes qui lui faisaient face. S’en étaient-elles rendues compte ? La jugeaient-elles secrètement ?

Elle sentait bien que depuis qu’elle était devenue présidente, les regards avaient changés. Si avant, elle ne suscitait que les regards de sympathie, les sourires sincères, elle sentait qu’aujourd’hui, c’était différent. Certains se montraient délibérément hostiles. D’autres se montraient ostensiblement ouverts et encourageants, pour la convaincre d’accepter leurs projets ou de soutenir leurs demandes. Elle ne savait plus sur qui se fier. Qui était franc et loyal ? Qui ne l’était pas ?

Oui, laquelle de ses bonnes dames était réellement ravie de jouer aux cartes avec elle ? Qui n’était là que pour rapporter à tout le village qu’elle mangeait plus de biscuits qu’elle n’aurait dû ?

Alors qu’elle s’apprêtait à prendre un douzième biscuit, elle se ravisa et s’excusa. Elle devait aller au petit coin. Quand elle fut enfin seule aux toilettes, elle s’adossa à la porte des toilettes et soupira. Elle en avait assez de faire semblant, elle en avait assez de se préoccuper des problèmes des autres. Depuis qu’elle avait été élue, sa vie prenait l’eau, et elle sentait que bientôt, elle n’arriverait plus à respirer.

Elle rêvait de pouvoir se confier de nouveau à Susan. Son amie avait pris ses distances ces derniers mois. C’était sa faute, elle n’avait pas été disponible, elle n’avait pas su voir les signes, elle n’avait pas pris le temps de l’écouter. Finalement, elle avait appris pour le cancer de Rick par Bruce. Immédiatement, elle avait tenté de rattraper le coup avec Susan, elle l’avait appelé, elle s’était excusée. Elle lui avait promis qu’elle serait là quoiqu’il arrive. Malheureusement, le mal était déjà fait.

Susan lui adressait encore la parole, bien sûr. Elle passait même de temps en temps prendre le thé, mais elle ne se dévoilait plus comme avant. Susan ne lui confiait plus ses peines, et Rita n’osait plus lui faire part de ses doutes. Il y avait désormais trop de secrets et de non-dits entre elles. Rita était en train de perdre sa seule véritable amie, tout ça pour une maudite présidence.

Oui, ses deux piliers de vies étaient en train de s’effondrer et elle ne savait pas comment faire pour les en empêcher. Bruce la fuyait. Depuis six mois, depuis qu’elle était l’honorable présidente du comité, il ne la touchait plus.

Le point positif est qu’il avait arrêté de boire, il avait cessé de déambuler en pyjama dans la maison. Désormais, il partait au petit matin et ne regagnait la maison que pour dîner dans un silence monastique. Quand il prenait enfin la parole, ce n’était que pour déplorer la perte de son van chéri. Il avait cessé de lui poser, mille et une questions. Oh, au départ elle en avait été soulagée, pas de question, pas de réponse. Mais plus le temps passait, plus elle décelait quelque chose dans le regard de Bruce, quelque chose qui ne lui disait rien de bon.

Parfois, elle se demandait presque si Bruce ne connaissait pas déjà la vérité. Sa manière de lui parler, ses gestes, tout était devenu si distant. Elle ne voulait pas le perdre, mais elle ne savait plus comment le retrouver.

Aller, respire Rita, ce n’étaient pas les premiers aléas de sa vie, et ce ne seraient pas les derniers. Bruce allait revenir, bientôt cinquante ans de mariage. Ils allaient surmonter ça.

Bon il fallait qu’elle y retourne, tant pis, elle allait gagner la partie. Elle n’allait pas faire semblant pendant ses deux années de présidence. Et puis, il ne restait pas beaucoup de temps de jeu, la réunion de crise n’allait pas tarder à commencer. Le vol de quatre statuettes de jardin commençait à faire jaser à Riverside Gardens. Certains avaient même déjà commencé à cacher leur petits compagnons de pierres, dans leur petites maisons. Tant que le voleur ne serait pas démasqué, Riverside Gardens ne dormirait plus sur ses deux oreilles.

Hop, elle sortit des toilettes, jeta un coup d’oeil à son reflet. Elle avait mauvaise mine, sa chemise était sur le point d’éclater. Embarrassée, elle tenta de rentrer le ventre sans succès. Tant pis.

Au moment où elle se dirigeait vers la table, un sourire factice exposé sur son visage, ces quelques mots parvinrent à ses oreilles : « Pas étonnant qu’elle mange autant, Bruce la trompe, c’est sûr. Je l’ai vu roder autour de la maison, de… comment elle s’appelle déjà… roh… Peu importe… la Marie couche toi là… ».

Le sang de Rita ne fit qu’un tour, et elle quitta le hall.

Susan

Susan fit le tour du jardin. Elle regarda autour d’elle, personne. Trois coups brefs sur la porte, et un long, puis elle tenta un miaulement discret. Dans un grincement, la porte du petit cabanon s’ouvrit.

« Entre », lui somma Andrews. Il se tenait face à Susan, l’air amusé. Qu’est-ce que c’était drôle d’avoir inventé ces rituels pour ouvrir à ses clients ! Il les apercevait toujours avant cette cérémonie absurde. La plupart du temps, leur visage était crispé par l’appréhension. Parfois, ils se trompaient, et c’était alors le plus hilarant. Ils s’y reprenaient à plusieurs fois, s’égaraient, et finissaient presque par abandonner et faire demi tour. Alors seulement, il leur ouvrait.

Susan, c’était différent, elle avait suivi les instructions sans aucune hésitation. Elle avait l’air plus que décidée. Perplexe, elle regardait autour d’elle, le cabanon avait été transformé en véritable pharmacie et boutique de remontants divers et variés. C’était tellement bien rangé, qu’on se serait cru dans une vraie boutique d’apothicaire. Du bout des doigts, elle frôla les boîtes de thé aux « Herbes ». Sans nul doute, elle trouverait ce qu’elle cherchait ici.

Andrews la toisa. Il aimait bien Susan, elle était la femme d’un de ses meilleurs amis ici. Elle était plutôt gracieuse, et elle possédait une douceur que peu possèdent encore à son âge. S’il pouvait l’échanger contre l’autoritaire Martha, il le ferait. Mais ils n’étaient pas là pour ça.

Susan hésita un instant avant de se lancer. Elle avait besoin d’un petit remontant naturel pour soulager la douleur de Rick. Un nuage noir passa à travers les yeux turquoises d’Andrews. Rick n’était pas bien, Rick souffrait, Rick était à l’hôpital, et il ne pouvait rien faire.

Susan poussa un soupir, les larmes s’amoncelaient au creux de ses yeux. Le cancer de Rick ne s’arrangeait pas. Il n’avait pas supporté la chimio, il avait renoncé aux soins après seulement un mois d’essai. Tous les mots que Susan et ses enfants avaient pu prononcer n’avaient rien changé. Il ne voulait plus se soigner, il voulait partir tranquille.

Tranquille, tranquille, que croyait-il ? Qu’il allait mourir, peinard dans son lit, un sourire sur les lèvres ? Eh bien, non, Rick, un cancer, ça fait mal ! Il y a deux semaines, son état avait subitement empiré. Elle avait dû l’emmener à l’hôpital, il n’arrivait plus à respirer correctement. Voilà, bravo Rick, maintenant tu es sous respirateur dans une chambre d’hôpital, impersonnelle et si loin de Susan.

Le plus dur, était de se réveiller seule au creux des draps, de ne pas sentir le corps chaud et fripé de Rick à son coté. Même l’haleine fétide du matin lui manquait. Il allait falloir qu’elle s’habitue, elle le savait. Rick ne reviendrait jamais à la maison, il allait mourir à l’hôpital. Tout espoir l’avait quitté.

Andrews la prit par les épaules et la tira contre lui. Elle posa sa tête contre son torse, et se mit à sangloter. Il lui caressa les cheveux en lui susurrant des mots rassurants. Susan se sentit d’un coup comme une petite fille, tellement faible, mais enfin rassurée. Ils restèrent un instant ainsi. Quand les larmes de Susan se tarirent, quand Andrews sentit que les soubresauts qui soulevaient la poitrine de la douce s’étaient arrêtés, il desserra son étreinte.

Un peu gênée, elle se recula, et sourit à Andrews. Si aucun son ne sortit de ses lèvres, il put y lire « Merci ». « J’ai ce qu’il lui faut à notre Rick. ». Il fouilla l’étagère du fond et en sortit un gros pavé de beurre vert. « Avec ça, tu vas pouvoir lui cuisiner des petites douceurs, qui lui rendront la douleur bien plus supportable. ». Elle hocha la tête, oui c’était parfait. Parfait, discret, et facile.

Il lui emballa le beurre dans un sachet en plastique, et ajouta une boîte de thé « apaisant », pour elle, cette fois-ci. Il fallait qu’elle dorme, qu’elle ait assez de force pour les deux. Susan chercha fébrilement dans son sac les billets. Ses doigts tâtaient encore le fond de son sac quand Andrews posa la main sur son poignet et lui dit : « Ttttt c’est pour moi. ».

Bruce

400 dollars ! Il avait réussi à vendre cette horreur 400 dollars. Il l’enverrait demain matin. Parfait ! Il lui restait encore le suricate en céramique, les enchères venaient tout juste de commencer. Mais il pensait en retirer au moins trois ou quatre billets verts.

Quelle idée de génie, il avait eu ! Sa combine marchait à la perfection. On avait voulu se jouer de lui ? Eh bien, maintenant il se jouerait des autres. Pas question pour lui de renoncer à son van.

Le seul problème, c’était que les maisons inhabitées n’avaient désormais plus aucune figurines de jardin, plus de nains, plus d’animaux exotiques. Il avait tout vendu. Ça avait été d’une facilité déconcertante. Il faisait ça depuis des mois, et personne ne s’était rendu compte de rien. Par contre, depuis qu’il s’attaquait aux jardins des résidents vivants… Riverside Gardens devenait plus suspicieux. Il devait faire attention.

Bientôt il pourrait acheter le van de ses rêves, enfin… Le bus dans lequel il allait aménager son van. Encore un peu plus de mille dollars, et il pourrait se remettre au travail. Et cette fois-ci, il travaillerait d’arrache pied pour partir au plus vite, avec ou sans Rita !

Ah Rita, quelle vipère ! Il ne pouvait songer à elle sans sentir monter en lui une rage brûlante. Elle avait vendu son van ! Vendu ! Qui faisait ça ? Qui manigançait derrière le dos de son adorable mari ?

Et elle lui cachait encore ! Non seulement, elle l’avait vendu, mais en plus, elle avait impliqué son fils ! Qui d’autre était au courant ? Toute la famille, ou juste Rita et Mickael ? Il avait le sentiment d’être le dindon de la farce. Le pire pour lui avait été le mensonge. Ça faisait plus de six mois qu’elle lui mentait honteusement droit dans les yeux. Il la pensait douce et aimante, mais cette femme était sans scrupule !

Oui, d’accord, elle l’avait fait pour rembourser leurs dettes, mais elle aurait pu lui en faire part. Et puis, hop, elle utilisait l’argent pour s’acheter d’affreux koalas pour décorer le jardin ! Ah oui, il avait fouillé après avoir vu la vidéo surveillance montrant Mickael, il avait eu un doute. Rita était-elle impliquée ? Mickael n’avait jamais été le plus malin de ses enfants, fomenter un plan pareil n’était pas dans ses capacités. Il en était sûr que Rita était le cerveau du crime.

Alors il avait fouiné, il avait fouillé dans les relevés de compte, dans les papiers administratifs. Elle avait vendu le pauvre van, dix mille dollars, dix mille malheureux dollars. C’était une blague ! Il en valait au moins cinq mille de plus ! Puis il avait continué à chercher, et il avait vu les dépenses des figurines de jardins. Presque mille dollars pour deux pauvres koalas, il en avait perdu la raison.

Ce soir là, il s’était enfermé dans la chambre d’ami, et avait sauté le dîner. Il avait prétexté un horrible mal de ventre, elle l’avait laissé. Oh, il aurait pu tout lui dire, la mettre sur le fait accompli. Mais il voulait voir combien de temps, elle pourrait lui mentir. Trop longtemps.

Puis en repensant au prix exorbitant des figurines en pierre, il avait eu cette brillante idée. On lui avait volé son van, il volerait les figurines des résidents.

Repenser à tout ça le mettait en rage, son amour pour Rita s’étiolait de jour en jour. Il avait besoin d’aller voir Paula, ses caresses lui feraient le plus grand bien…

Paula

Paula caressait la peau fripée d’Andrews. Elle passa un doigt sur la longue cicatrice qui barrait son mollet. Chez tous les hommes, elle aimait les cicatrices. Oh oui, elle aimait les histoires fantastiques qu’ils inventaient pour raconter une simple coupure, un accident de bricolage ou même une chute inopportune. Ah ça, elle adorait les questionner, faire sa midinette mièvre, oh vraiment, oh ça a dû faire sacrément mal, qu’est-ce que tu as été courageux alors…

Oui, un amant flatté était toujours un meilleur amant. Si c’était elle qui décidait où et quand, elle les faisait se sentir hommes, puissants, virils, indispensables à son plaisir. Jusqu’à maintenant, ça avait marché comme sur des roulettes.

Andrews la regardait intensément. Ses beaux yeux bleus contemplait le corps usé mais harmonieux de la nymphe. Aurait-il envie d’un second round ? Paula ne dirait pas non, mais elle ne se voilait pas la face. Le bonhomme avait soixante-dix ans, pas vingt. À cet âge là, ce n’était pas quelques heures qu’il leur fallait mais plusieurs jours pour repartir de plus belle.

Il effleura son épaule, et l’agrippa pour la tirer vers lui. Elle se blottit un moment contre son torse large qui avait gardé sa fermeté malgré les années. La tête posée sur son coeur, elle écouta les battements réguliers. Il fallait qu’elle arrête cette aventure, songea-t-elle. Elle sentait que les digues commençaient à prendre l’eau, elle sentait que si elle continuait ainsi, elle ne contrôlerait plus la situation. Il était hors de question que cette situation lui échappe. Hors de question.

Il était toujours dans son lit, autant essayer d’en profiter un maximum. Elle tenta une dernière manoeuvre, pressa son bassin contre celui d’Andrews. Tiens, tiens, ça n’a pas l’air d’être si endormi là dessous. Sur ce, elle l’embrassa.

Après plusieurs minutes d’un ébat passionné et tendre, ils s’allongèrent côte à côte, essoufflés. Ah que c’était bon, Andrews était vraiment un amant de choix. Ça allait être dur de s’en passer, mais c’était mieux pour tout le monde.

Dans un souffle, elle lui dit « Ta femme va t’attendre pour le dîner. ». Andrews la regarda l’air surpris. Elle ne lui parlait jamais de sa femme, et elle ne le poussait jamais dehors. Que lui arrivait-il ? Fier, il hocha la tête. « Tu as raison, je file, je passe par la porte de derrière. ». Il se rhabilla à la hâte, un peu confus. Elle le regarda attendri et cacha son affection naissante sous une impatience équivoque.

Elle ne put se résoudre à lui dire adieu à cet instant. Ils se donnèrent rendez-vous quelques jours plus tard. Quand elle entendit la porte de derrière claquer, elle soupira. Tentée de renifler les draps emprunts de son odeur, elle défit le lit à la hâte et fourra le tout dans la machine à laver. Elle garderait le contrôle quoiqu’il arrive.

Alors qu’elle lançait le cycle court, quelqu’un sonna à la porte. Elle couvrit son corps nu d’un peignoir en satin rouge sang, et se dirigea vers l’entrée. Ouvrant la porte, elle trouva face à elle Bruce, un regard coquin pour seul message.

Suite la semaine prochaine.

Une réponse sur « Chapitre 6 : Un vol de plus »

Laisser un commentaire